mercredi 16 février 2011

Et si un homme chantait « Dans la peau » ?

Marie Carmen
Certains et certaines d’entre vous, habitués à ma chronique (eh oui, ça existe), avez sans doute remarqué chez moi une propension naturelle à chercher la petite bête, le défaut de la cuirasse, la fausse note dans la symphonie.  Afin de ne pas vous décevoir, je récidive aujourd’hui avec un sujet léger, mais évocateur d’une tendance aux deux poids, deux mesures selon le sexe, un phénomène si courant, dans notre société dite progressiste, qu’on pourrait ne plus y faire attention.  Autopsie d’une chanson populaire.


C’est en 1989 que Marie Carmen envahissait la scène musicale avec la chanson et le vidéo clip intitulés Dans la peau.  Refrain accrocheur, rythme syncopé, voix mordante, animale, interprète sémillante, aux mouvements de panthère, ce morceau avait tout pour devenir un hit et imposer l’artiste.  Une part de son succès venait sans contredit du caractère affirmatif, très assumé, de cette amazone érogène, conquérante, déterminée à assiéger l’homme de ses désirs et à assouvir ses fantasmes les plus téméraires.  Que de chemin parcouru depuis les Miladys minaudant Sugar Town !

Peut-être lui ?
Plus de vingt ans plus tard, j’écoutais Dans la peau à la radio.  Était-ce le fait de ne pas être distrait, pourquoi pas séduit, par la sensualité de l’interprète à l’écran ?  Ou le fait de savoir depuis le temps que la passion dévorante est rarement vécue avec sérénité, pour le sujet comme pour l’objet de cet état d’âme extrême ?  Toujours est-il que la succession haletante des vers de ce classique du genre finit par me donner, comme il y était répété, « des frissons dans le dos ».  Une question s’imposa aussitôt à moi : et si un homme chantait ça ?  À la base de mes spéculations, j’ai retranscrit la chanson, en la masculinisant, bien sûr, mais en ne changeant rien d’autre.  Voyez ce que ça donne :

Dans la peau
(Marie Carmen / Styve Tracy)
Paroles originales :
http://www.lyricsmania.com/dans_la_peau_lyrics_marie_carmen.html

Tu peux toujours me tourner le dos
J’attendrai, j'ai tout le temps qu'il faut

Maintenant que je t'ai dans la peau
J'ai le droit d'avoir le dernier mot 


Tout doux, je t'aurai
Partout je te suivrai
Comme un loup affamé
Je te fais prisonnière 


Dans la peau oh oh oh
Je te promets des frissons dans la peau 

Oh oh oh dans la peau
Je te donnerai ce que j'ai de plus beau 



J'ai tatoué mon nom a ton dos
Je ferai de toi l'amoureuse la plus chaude 

Maintenant que je t'ai dans la peau
Je serai le seul qu'il te faut 


Partout je te suivrai, j'm’en fous, je t'aurai 

Comme un loup affamé
Je te fais prisonnière 



Dans la peau oh oh oh
Je te promets des frissons dans le dos 

Oh oh oh dans la peau
Je te donnerai ce que j'ai de plus beau 


Dans la peau oh oh oh
Je te promets des frissons dans le dos 

Oh oh oh dans la peau
J'ai tatoué ton nom, j'ai tatoué ton nom

Barbara Streisand
Remarquez, l’exercice aurait été pire avec Woman In Love, chantée par Barbara Streisand, mais restons francophones.  Mesdames, aimeriez-vous vous sentir le centre – ou la proie - de pareilles assiduités ou ne vous sentiriez-vous pas plutôt enclines à vous inscrire à des cours d’autodéfense ?  Imaginez-vous Mario Pelchat, Corneille ou mieux (façon de parler), Herbert Léonard, poussant une ritournelle aussi sulfureuse, pour ne pas dire combative ?  Nos amies les féministes militantes ne trouveraient-elles pas dans chaque vers une incitation à la violence faite aux femmes, aux agressions sexuelles ?  Poser la question…

Gare à la rectitude politique !

Les garçons agressés, toujours oubliés
Bien qu’il ne se passe pas une semaine sans que les garçons, enfants comme adolescents, ne fassent la manchette non pas comme agresseurs, mais bien en tant que victimes d’agressions sexuelles, les femmes restent pratiquement considérées comme les seules cibles de ce fléau.  Quarante ans de « sensibilisation », statistiques biaisées à l’appui démonisant l’homme, ne contribueraient possiblement pas à faire d’une version masculine de Dans la peau un numéro un au palmarès.  Il est même à se demander si une chanson du même tonneau, avec une interprète féminine, pourrait aujourd’hui voir le jour, pas tant par respect pour les hommes que parce que leur reconnaître un quelconque pouvoir d’inspirer pareille passion passerait pour déplacé.  En publicité, comme dans nos téléromans et télé séries, nous vivons à l’ère du faire valoir de service, insipide et dénué du plus élémentaire pouvoir de séduction.

Rêvons en couleurs et imaginons que des bonnes fées, pétries des meilleures intentions, s’indigneraient du caractère soi-disant agressant de la chanson envers les hommes.  Faudrait-il aller jusqu’à la dénoncer ou pire, la bannir ?  Il s’agirait là d’une alternative bien dogmatique.  Dans la peau représentait en 1989 un signe des temps, reflet d’une époque où des artistes féminines affichaient le droit des femmes de vivre à fond leur sensualité sans complexes.

Clint Eastwood
À notre époque où une version « épurée » du mot nigger de Tom Sawyer, de Mark Twain, vient de paraître aux États-Unis et où l’on songe à mettre Tintin au Congo à l’index pour racisme en Belgique, il ne faudrait pas en rajouter au nom de la rectitude politique.  Ces œuvres étaient représentatives de la société du temps où elles furent créées.  Autant bannir les films de Sergio Leone parce que Clint Eastwood y mâchouille son sempiternel cigarillo.  Ces longs-métrages pourraient cependant finir par connaître pareil sort à cause de leur fort indice de testostérone ou parce que le regard assuré et frondeur d’Eastwood représenterait, aux yeux de certaines, une menace à l’identité féminine.  Faudrait-il que son nom devienne personne afin de les rassurer ? 

Qui osera ?

Éric Lapointe
N’empêche que je n’ai toujours pas de réponse à ma question : et si un homme interprétait Dans la peau ?  Un débutant verrait peut-être sa première chanson devenir la dernière.  Seul un interprète populaire mais atypique pourrait faire passer la pilule. Un Éric Lapointe délinquant ?  Les Trois Accords, spécialistes de l’autodérision ?  Des rappeurs ?  Comment réagiraient nos féministes ?  À part une marche aux dix ans et une gaffe médiatique occasionnelle, la FFQ reste muette.  Après un début de présidence fracassant, le Conseil du statut de la femme évite judicieusement de laisser sortir Christiane Pelchat en plein jour.  Sans doute le Conseil émettrait-il un nouvel avis dénonçant l’antiféminisme de la chanson, associée à une mouvance d’extrême droite incarnée par le Tea Party.  En attendant, le défi lancé aux interprètes masculins de tenter cette chanson mériterait d’être relevé, tant pour ses qualités intrinsèques que pour le pied de nez à la rectitude politique.  Alors, qui osera ?

3 commentaires:

Malthus a dit…

Le Canadian Broadcast Standard Council a récemment banni de nos ondes la chanson Money for Nothing de Dire Strait parceque le mot "faggot" y est prononcé.
Dans une société si frileuse face à la liberté d'expression et si chaude aux notions de censure, de baillon et de protection des pauvres petites émotions du moindre quidam, seul un inconscient de premier ordre oserait se lancer à l'assaut de pareille tâche.
Celà dit, je nomine Roch Voisine. MacDonald cherche de bons serveurs de burgers.

Le blog d'Olivier Kaestlé a dit…

J'avais presque oublié cette dérive concernant Dire Straits. Roch Voisine, chantant "Dans la peau"? Peut-être aux États-Unis, en gardant la version française pour qu'un nombre restreint de résidents puisse la comprendre. S'il devait la chanter au Québec, peut-être vaudrait-il mieux effectivement immigrer chez nos voisins, sous le pseudonyme de Roch Neighbors. Compte tenu de son accent québécois gommé pendant son heure de gloire en France, une telle métamorphose n'est pas inconcevable.

Non, finalement, je ne vois pas qui pourrait relever le gant, hormis les artistes que j'ai mentionné et encore, je ne parierais pas sur leur audace. Même dans la rébellion, il semble qu'un code de rectitude politique ait force de loi...

Unknown a dit…

En France comme au Canada ou aux USA, le politiquement-correct, la bien-pensance, la rectitude politique et le prêt-à-penser sont imposés par les médias, la pseudo-élite auto-proclamée de gauche, les bobos populistes, le tout contrôlé par les lobbys, les associations de crétins et leurs armées d'avocats.

La censure comme l’opprobre médiatique de celui qui déplait au "système" sont vécus par chacun comme les cachots de l'Inquisition espagnole. Comme la moindre broutille mal interprétée peut vous y conduire, plus personne ne fait rien, n'ose rien et chacun, par son inaction, laisse les gérants d'estrade décider de modeler la société à leur gout.

Bien sur, Internet permet à des troublions ou anonymes de tenter la révolte. Mais les gérants d'estrade savent très bien qu'ils sont noyés dans la masse inutile et polluante de sites mercantiles, narcissiques, culinaires ou pornographiques.

Les féministes font parti des censeurs qui décident de ce qui est permis aux femmes et interdit aux hommes. Depuis qu'elles ont métastasé les États en institutionnalisant leurs doléances sexistes, ces États laïcs et démocratiques se sont transformés en régimes féministes (Québec, Canada, Pays Scandinaves, Australie...) ou l'homme est pourchassé pour ce qu'il est: une atteinte vivante aux droits des femmes.

Quand on écoute Soral, la chanson, l'interprétation appartient aux femmes. Elles ne sont pas capables de créer, juste de bien reproduire, de bien recopier. Il convient donc de la laisser chanter, jouer de la musique, coudre, broder et s'appliquer aux travaux d'intendance. Même avec l'accès aux études, aux emplois, aux carrières, à la politique, à la police, à l'armée (...) les femmes n'ont toujours rien inventé, rien créé, rien apporté. Les grandes inventions et avancées modernes viennent des hommes.

Même dans les régimes féministes ou d'être de sexe féminin est une note de rattrapage, l'égalité forcée n'a pas produit l'éclosion du génie féminin. Par contre, cette constatation n'a fait qu'envenimer la rage de la Féminista (mouvance extrémiste) à l'encontre des hommes qui favorisent les programmes pour faire régresser les garçons voir même, leurs interdire l'accès à certaines professions honorifiques, tout en ouvrant d'avantage les prisons pour hommes sur simple culpabilité en virilité trop appuyée. En Iran, la femme qui émoustille un homme par sa tenue ou ses propos est réprimandée. Dans un régime féministe, un homme qui désire une femme est condamné.

L'égalité féministe consiste à définir les résultats sur la base du sexe. S'il doit y avoir 100 postes de médecins ouverts à la faculté, on en réserve 40 pour les meilleurs résultats au concours des garçons, et les 60 autres places seront prise par les filles jusqu'à remplissage, peu importe les notes. C'est le système qui prévaut actuellement en politique (avec les ministres femmes) et dans l'industrie (quota de femmes) avec pour ces régimes, un lent mais manifeste plongeon culturel et économique puisque plus rien ne se créé ni ne se transforme.

Alors, qu'un homme chante une chanson d'amour masculinisée pour aller chercher des cris d'orfraie d'une Féminista prompte au chialage, c'est pas important parce que c'est assuré. Le deux-poids-deux-mesures n'a pas été inventé par les féministes mais par les dictatures. La Féminista s'en réclame sous un masque de victime. Il n'y a rien à faire que de laisser les régimes sombrer d'eux-même. Aucun matriarcat n'a jamais survécu.

Une première depuis 2009 : Blogger retire l'un de mes billets.

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