La poussière commence à peine à
retomber après le verdict de meurtre au second degré qui a été rendu ce 6 décembre contre Guy
Turcotte pour les meurtres d’Olivier, cinq ans, et d'Anne-Sophie, trois ans,
assassinés de 46 coups de couteau à Piedmont en février 2009. « Yes ! », aurait laissé échappé Isabelle
Gaston, la mère des victimes, à l’énoncé du verdict. Justice aurait été rendue et nombreux sont
ceux qui croient sincèrement que notre bon peuple retrouvera confiance en notre
système judiciaire. Bon, moi je veux
bien mais...
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Isabelle Gaston |
… Je ne suis pas convaincu, malgré les
éléments au second procès qui indiqueraient que le cardiologue aurait agi avec
préméditation, comme le fait de déplacer des rendez-vous prévus le jour du meurtre. C’est pourtant un verdict d'homicide au
second degré qui a été rendu, qui excluait en principe la préméditation. Il est bien possible que ce verdict soit le
bon, et que le précédent, excluant la responsabilité criminelle, ait été trop
clément. Mais comment savoir ce qui se
passe dans la tête d’un criminel, comme le faisait remarquer récemment le
chroniqueur Richard Martineau. Pas plus
que lui, je n’ai la prétention de le savoir.
Parallèlement à cette énigme, demeure
celle, en filigrane, de ce qui s’est passé dans la tête d’Isabelle Gaston au
cours des mois qui ont précédé la tragédie.
Aux yeux de certains, nous avons affaire à une femme sans reproche,
tout aussi victime que ses enfants. Aux
yeux d’autres, elle est aussi coupable que Turcotte, quand elle n’est pas
devenue l’unique responsable du double meurtre.
C’est à croire qu’elle aurait téléguidé le geste de son ex avec une
télécommande et appuyé sur le bouton « strike » 46 fois…
Les nuances n’ont jamais tué personne…
Je ne le répèterai jamais assez :
le geste de Guy Turcotte est inexcusable.
Rien ne justifie le fait de tuer ses enfants, qu’il s’agisse de
désespoir, de peine, de sentiment d’abandon, de trahison, ou pire encore, de
désir de vengeance. Mais peut-on
vraiment affirmer sans sourciller qu’Isabelle Gaston n’ait rien à voir dans la
disparition de ses enfants ? Est-ce que
le fait d’identifier une responsabilité chez elle atténue en quoi que ce soit
celle de Turcotte ?
Je répondrais non aux deux questions. La responsabilité du meurtrier a beau rester entière, elle n’exclue pas pour autant l’hypothèse qu’indirectement, Mme Gaston ait eu quelque chose à voir dans cette triste affaire.
Je répondrais non aux deux questions. La responsabilité du meurtrier a beau rester entière, elle n’exclue pas pour autant l’hypothèse qu’indirectement, Mme Gaston ait eu quelque chose à voir dans cette triste affaire.
Contrairement à nombre d’âmes
compatissantes, je ne suis toujours pas convaincu que Guy Turcotte ait tué à
seule et unique fin de faire souffrir Isabelle Gaston, bien que cette
éventualité soit à considérer devant la violence inouïe du geste. Des témoignages au premier procès
présentaient le cardiologue comme un père qui préférait la compagnie de ses enfants à
celle des adultes lors des réunions familiales.
Ce père semblait même plus proche d’eux que leur propre mère. Se peut-il que la peur de perdre la garde de ses enfants dans un contexte où la Justice penche plus souvent qu’autrement en faveur de la mère en cas de litige ait pu peser dans la balance et qu'il ait vraiment pensé les amener avec lui dans la mort ?
Ce père semblait même plus proche d’eux que leur propre mère. Se peut-il que la peur de perdre la garde de ses enfants dans un contexte où la Justice penche plus souvent qu’autrement en faveur de la mère en cas de litige ait pu peser dans la balance et qu'il ait vraiment pensé les amener avec lui dans la mort ?
Sainte-Isabelle
S’il y a eu un désir de vengeance,
n'existait-il vraiment que d’un seul côté, celui du cardiologue ? On pourrait en douter, en examinant les
circonstances précédant le double meurtre.
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Guy Turcotte |
Comprenons-nous bien : je trouve
aberrant que l’on rendre Isabelle Gaston coupable du geste de son mari parce
qu’elle lui a été infidèle. Nul n’a le
droit de la condamner d'avoir cessé d'être amoureuse de Turcotte, ni même
d'être allée voir ailleurs. Ces choses-là arrivent et on ne peut empêcher un
cœur d'aimer ou de cesser d'aimer. Ainsi va la vie.
Là où j'ai un problème très sérieux avec la personnalité de Mme Gaston,
en dehors de la sanctification béate ou de la condamnation unilatérale qui l’accompagne,
c'est dans la manière dure, pour ne pas dire sauvage au plan
psychologique, dont elle a agi envers Turcotte. C'est à se demander si elle
ne désirait pas que la rupture lui soit le plus douloureux possible.
Sachant très bien que son futur ex était un homme
fragile en « thérapie », elle le trompe avec un ami du couple (Je ne la blâme
pas pour ça, ça peut arriver.), mais trouve judicieux d’avoir des rapports
sexuels avec son amant dans le lit conjugal (Parlez-moi d’un geste empli de tact !).
En voyage au Mexique avec Turcotte avec les enfants, elle lui reproche de ne pas lui avoir dit qu’il était au courant de sa relation adultère (L'ex de son amant venait de l'informer au téléphone qu'elle avait récemment tout révélé au cardiologue.) ! Qu'elle dissimule son infidélité, c'est cool, mais que son mari lui cache qu'il est au courant des faits, c'est ingnoble ? Eh ben…
En voyage au Mexique avec Turcotte avec les enfants, elle lui reproche de ne pas lui avoir dit qu’il était au courant de sa relation adultère (L'ex de son amant venait de l'informer au téléphone qu'elle avait récemment tout révélé au cardiologue.) ! Qu'elle dissimule son infidélité, c'est cool, mais que son mari lui cache qu'il est au courant des faits, c'est ingnoble ? Eh ben…
De retour au Québec, Turcotte, éjecté aussitôt de son
domicile par Gaston, doit se trouver une maison en un temps qui mériterait de
figurer au Guinness. Son auto n'a pas quitté le stationnement, qu’un autre
record, de rapidité d’atterrissage celui-là, est établi quand le véhicule de l'amant y prend place. Les ex conjoints deviennent à couteaux tirés, sans jeu de mots facile...
Certainement en vue de créer un climat de saine collaboration dans l'intérêt des enfants, faut-il présumer, Mme Gaston change au plus vite les serrures de sa maison et, la veille du double meurtre, menace Turcotte de disparaître avec Olivier et Anne-Sophie sous une fausse identité. Parlez-moi d'une femme accommodante...
Certainement en vue de créer un climat de saine collaboration dans l'intérêt des enfants, faut-il présumer, Mme Gaston change au plus vite les serrures de sa maison et, la veille du double meurtre, menace Turcotte de disparaître avec Olivier et Anne-Sophie sous une fausse identité. Parlez-moi d'une femme accommodante...
Bien que Mme Gaston ait affirmé, au
lendemain des meurtres et sous auréole, qu’elle avait accordé à son ex la garde
partagée pleine et entière, on peut légitimement douter de sa bonne volonté. Est-il bien téméraire de présumer que de garde
partagée, on serait vite passé à garde exclusive, en invoquant l’instabilité
émotionnelle du père, et que cette garde aurait pu être accordée aisément à la
mère, disposant même sur place d’un père de substitution ?
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Olivier et Anne-Sophie Turcotte |
Je sais, je ne fais que spéculer. On ne saura jamais vraiment ce qui aurait pu
se passer. Un Turcotte plus sain d’esprit
aurait pu demeurer dans l’anonymat l’un de ces nombreux pères floués par le
système, devenu guichet automatique de pension alimentaire avec un hypothétique
droit de visite une fin de semaine sur deux.
Il y en a tant, des comme ça…
Non, rien n'excuse le geste de Turcotte, mais une
question qui tue subsiste : si Mme Gaston avait fait preuve d'un tant soit peu
de tact et de sollicitude envers un être qu’elle savait fragile dans sa gestion
d’une situation aussi délicate qu’une infidélité entrainant une double trahison
(épouse et proche ami) et si elle n’avait pas menacé son ex de lui ravir ses
enfants, ces derniers seraient-ils décédés ?
Je méditerais là-dessus avant d’exonérer Isabelle
Gaston de toute responsabilité dans ce double meurtre bien que, et je le
répète, rien n'excuse Guy Turcotte.