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Patricia Paquin |
L’animatrice Patricia Paquin est la porte-parole de « l’événement ». La publicité, éloquente, ne passe pas inaperçue. On y apprend que cette année, plus de femmes mourront d’une maladie cardiovasculaire que de tout autre maladie au Canada. Mme Paquin renchérit : Prenez un moment pour penser aux femmes que vous aimez et imaginez que vous pourriez contribuer à sauver une seule d’entre elles. Suivent ensuite des instructions pour se rendre sur le site de la campagne afin d’organiser un souper à la santé de celles que vous aimez. N’invitez surtout pas de gars, vous auriez l’air d’avoir de bonnes manières !
Cette campagne discriminatoire implique sournoisement que seules les femmes méritent la considération afin de préserver leur santé. Je n’ai rien contre le fait qu’une initiative semblable soit mise sur pied, bien au contraire, à condition qu’autre autre d’importance égale soit consacrée aux hommes. Dans le cas présent, les hommes, la Fédération des maladie du cœur et Becel s’essuient avec ! Es-ce par ignorance ?
Improbable puisque, selon des chiffres provenant de ladite fondation même, les maladies cardiovasculaires étaient responsables de 30 % de tous les décès au Canada en 2006, soit 30 %, chez les hommes, et 31 % chez les femmes. Voilà un triste exemple où la parité homme femme est atteinte. Bien sûr on souhaiterait un contexte plus constructif. Il nous reste à conclure que, aux yeux de la Fondation des maladies du cœur, à risque égal, les femmes méritent qu’on s’occupe d’elles et les hommes, pas du tout.
À quand le ruban bleu ?
Cet incident regrettable me fait penser à un parti pris similaire, concernant cette fois le cancer du sein, le plus meurtrier chez la femme. Tout le monde connaît le ruban rose que l’on retrouve dans les épiceries, notamment sur les bouteilles de vin, initiative de la Fondation du cancer du sein du Québec. Encore là, je n’ai rien contre le fait qu’une telle campagne existe, ni contre la nécessité que des fonds soient consacrés à la recherche en vue d’enrayer cette terrible maladie. Pour y être opposé, il faudrait être sans cœur.
Là où – à nouveau – la bât blesse, c’est qu’il n’existe aucune initiative correspondante afin d’enrayer le cancer de la prostate, de loin le plus meurtrier chez les hommes. À quand une Fédération du cancer de la prostate du Québec, et la présence d’un ruban bleu sur les bouteilles de vin ? Une telle initiative est-elle si impensable dans un État sans Conseil du statut de l’homme, sans Secrétariat à la condition masculine, sans ministère de la Condition masculine ? Faudrait-il en arriver à s’encombrer de structures aussi inutiles et coûteuses que leurs contreparties féminines pour qu’enfin, les hommes soient considérés comme des être humains à part entière méritant la sollicitude et le respect ?
Il n’y a pas que les rubans roses. On apprenait, en octobre 2010, que, grâce à un partenariat privilégié avec Ultramar, la Fédération du cancer du sein avait pu récolter 1,5 millions en six ans, dont 235 505 $, cette année là. Pour la sixième année consécutive, un cent par litre d’essence Suprême vendu en octobre avait été recueilli. Faut-il le répéter, il n’est pas question ici de décrier pareille initiative. Mon questionnement demeure : comment se fait-il qu’aucune initiative comparable ne soit mise en oeuvre pour le cancer de la prostate ?
Si ce n’est pas par compassion, l’État devrait considérer l’économie de coûts sociaux que la recherche, associée à la prévention, pourrait permettre. Trop compliqué, sans doute. Pourtant, nos – très nombreux – bureaucrates en santé et services sociaux devraient y penser. Selon des données de 2010 de la Société canadienne du cancer, alors que 23 200 femmes recevront un diagnostic de cancer du sein et que 5 300 en mourront, ces sont 24 600 hommes qui recevront un diagnostic de cancer de la prostate et 4 300 qui en décèderont. Je souligne encore ici qu’hommes et femmes sont égaux devant la maladie. Pourquoi ne le sont-ils toujours pas devant la recherche ?
Un équilibre à rétablir
Il y a sept ans, le rapport Rondeau révélait des lacunes sérieuses dans la prestation des soins de santé et des services sociaux envers les hommes. On connaît – pas assez – la suite. La FFQ et quinze autres instances féministes devaient faire tabletter ce document en en condamnant les conclusions dans un mémoire intitulé Comment fabriquer un problème. Ces dames ne manquaient pas de culot, mais à coup sûr, de compassion, cette qualité soi-disant si féminine.
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Gilles Rondeau |
Les faits relevés plus haut sont pourtant éloquents; pas besoin de fabriquer de problèmes, ils sont là. Ajoutez à cela des réalités peu connues, qui conditionnent à la baisse la qualité de vie, à l’effet que le nombre de chômeurs, d’assistés sociaux et d’itinérants reste plus élevé chez les hommes que chez les femmes. Quoi, vous ne saviez pas ?
Onze fois plus de budget pour les femmes que pour les hommes, à même nos taxes, et des problématiques d’importance comparable. Chez un gouvernement pour qui l’expression parité homme femme est devenue un mantra, il semble pourtant qu’il y ait loin de la coupe aux lèvres quand il s’agit de prendre les hommes en considération. À quand un parti politique avec dans son programme un rééquilibrage dans l’octroi des ressources en santé et services sociaux qui tienne autant compte des hommes que des femmes ? Il s’agit pourtant là d’un enjeu élémentaire d’équité et de respect. Ça aussi, c’est une question de lucidité…