J’avais 14 ans quand, furetant dans une librairie, je louchais subitement vers un titre : À la recherche de l’orgasme.
Intrigué, comme tout jeune homme normal pouvait l’être, je voulus
savoir qui avait osé une formule aussi provocatrice. Elles étaient
cinq. Une image saugrenue s’imposa aussitôt malgré moi. J’imaginais
lesdites écrivaines, costumées en exploratrices et armées chacune d’un
filet à papillon, à l’affût, dans la jungle. Tel un rhinocéros en rut,
un orgasme jaillissait des broussailles, chargeant et dispersant
aussitôt notre commando en déroute, au milieu de cris de panique et d’un
repli débridé.
Bien que, bon an, mal an, des magazines féminins nous assurent que cette volupté ultime se dérobe obstinément à une femme sur deux, il est probable que le mot « orgasme » ait été employé par nos drôles de dames au sens figuré. C’est du moins la grâce qu’il faut leur souhaiter. De la poursuite du Graal, reprise de façon habile mais détournée par l’auteur du « Da Vinci Code », à la quête de l’inaccessible étoile de Jacques Brel, l’être humain a sans cesse été poussé par un besoin irrépressible de dépassement, une nécessité de repousser ses limites ou par l’emprise d’un désir d’absolu.
Bien que, bon an, mal an, des magazines féminins nous assurent que cette volupté ultime se dérobe obstinément à une femme sur deux, il est probable que le mot « orgasme » ait été employé par nos drôles de dames au sens figuré. C’est du moins la grâce qu’il faut leur souhaiter. De la poursuite du Graal, reprise de façon habile mais détournée par l’auteur du « Da Vinci Code », à la quête de l’inaccessible étoile de Jacques Brel, l’être humain a sans cesse été poussé par un besoin irrépressible de dépassement, une nécessité de repousser ses limites ou par l’emprise d’un désir d’absolu.
Cette
prédisposition innée a depuis toujours rendu l’homo sapiens capable du
meilleur comme du pire, tel un centaure souvent incontrôlable qui,
mi-homme, mi-animal, tire une flèche vers l’horizon sans jamais
l’atteindre. La flèche disparaît mais l’horizon, immuable et
impassible, demeure.
Le
tir du centaure, c’est ce qui depuis toujours se trouve à l’origine des
guerres ou de l’édification et de la chute des empires. C’est aussi
cette même pulsion qui inspira Pasteur à découvrir la vaccination,
Edison, l’électricité ou Marie Curie, le radium. C’est lui qui alimente
les valeurs élevées qui motivent des humanistes à secourir les
populations les plus démunies, avec des moyens de fortune. C’est
également cet instinct qui pousse des États à dépêcher des armées dans
ces mêmes pays afin de préserver des intérêts économiques sous des
prétextes humanitaires qui n’abusent qu’une minorité.
Plus
près de nous, c’est l’ambition légitime qui stimule des jeunes à
envisager une carrière, et à se donner les moyens de l’assumer. C’est
ce qui incite l’adulte, qui a fait le tour de son jardin, à réorienter
son avenir. C’est ce qui permet à des retraités de donner forme aux
projets qu’ils n’ont jamais pu concrétiser pendant leur vie active.
C’est à l’origine cet élan qui pousse le nouveau-né à s’appuyer sur une
chaise pour se dresser une première fois sur ses petites jambes.
C’est
malheureusement parfois aussi des rêves contrariés, comme ceux du
businessman chanté par Claude Dubois, à qui la réussite sociale a coûté
ses aspirations de jeunesse. C’est souvent les rêves délaissés par des
parents, avec une famille à nourrir. C’est également les rêves brisés
de gens qui n’ont jamais eu les moyens de leurs ambitions et qui ne le
réalisent que trop tard.
S’il
est important de choisir des rêves à sa mesure, il reste cependant
capital d’en avoir. C’est à ce prix que nous pouvons co-habiter avec le
centaure qui, trop souvent, sommeille en chacun de nous. Pour les
autres, il y a toujours les filets à papillons.
15 juillet 2007
Ce Rétrolivier est paru dans Le Soleil du 24 juillet 2007, sous le titre Des rêves à sa mesure.
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