L’hypersexualisation fait toujours la manchette. Au printemps dernier, un colloque sur le sujet s’était tenu en Mauricie dans le cadre de la journée internationale de la femme. L’influence pernicieuse de la publicité sur la perception qu’ont les femmes de leur corps avait été à nouveau dénoncée. Si certains exemples évoqués pour l’occasion semblaient inédits, le propos général sur le sujet restait le même que celui véhiculé par le mouvement féministe depuis plus de 40 ans.
De son côté, le Conseil du statut de la femme s’était fait copieusement rabrouer, l’an dernier, après avoir rendu public un avis sur l’hypersexualisation. Nos jeunes filles y étaient dépeintes comme des êtres fragiles, parfois au point de distribuer des faveurs sexuelles à qui les sollicite, en vue de faciliter leur intégration dans leur milieu social ou scolaire. Bien sûr, les médias, la publicité et Internet, tous mis sur le même pied, étaient à nouveau pointés du doigt, pour l’influence diabolique qu’ils exerçaient sur ces victimes, apparemment dénuées d’autonomie de pensée.
De nombreuses voix, notamment d’intervenants en psychologie et en sexologie, avaient dénoncé le discours du Conseil, jugé alarmiste et infantilisant. On alléguait, entre autres, que ces préceptes niaient la réalité que les jeunes filles, êtres sexués capables d’esprit de décision, pouvaient vouloir vivre leur sexualité selon leurs propres bases, et non toujours celles des gars.
Pour qui a élevé une adolescente selon des valeurs de respect de soi et de libre-arbitre, il est difficile de concevoir sa métamorphose subite en fragile roseau emporté par un tourbillon médiatique de perdition. Quand une jeune fille se comporte comme certaines féministes disent le redouter, le problème vient plus probablement d’un milieu familial ou social dysfonctionnel. Soustraire l’adolescente à toute influence médiatique s’avèrera alors aussi efficace qu’un sirop pour soigner une jambe cassée. Le problème, autrement plus sérieux, est ailleurs et les moyens de le régler, plus complexes.
Le discours victimaire sur l’hypersexualisation s’étend même depuis peu aux femmes adultes qui, pour les mêmes raisons que leurs cadettes, seraient de plus en plus incapables de déterminer si elles consentent à des rapports sexuels parce qu’elles le désirent ou parce qu’elles seraient victimes de stéréotypes. Sous prétexte de défendre leur cause, n’en a-t-on pas assez de présenter systématiquement les femmes, même une fois majeures et vaccinées, comme des êtres confus et indécis ?
Rendues à la quarantaine, elles auraient de la difficulté à vieillir à cause des représentations omniprésentes de femmes parfaites. Faudrait-il les enfermer dans un placard pour leur protection ? Bien avant l’avènement des médias électroniques, le vieillissement, tant pour les femmes que pour les hommes, a toujours comporté son lot d’obstacles. Il n’est pas téméraire de présumer que nos femmes quadragénaires détiennent en elles les ressources nécessaires au maintien de leur estime personnelle et ce, selon des critères plus élevés et durables que des images de séduction, somme toute assez futiles. Les changements les plus significatifs viennent toujours de l’intérieur.
Devrions-nous pour autant mettre au rancart jusqu’au terme d’hypersexualisation ? Plus qu’une problématique strictement féminine, ce phénomène touche d’abord nos jeunes, filles aussi bien que garçons, précisons-le, qui ne reçoivent plus de cours d’éducation sexuelle à proprement parler et se rabattent trop facilement sur les représentations irréalistes d’Internet pour les initier à la sexualité. Par son côté faussement éducatif, l’impact de ce média précis, plus que ceux de la publicité et des médias traditionnels, est à prendre en compte, sans le dramatiser. Une meilleure écoute parentale et des cours d’éducation sexuelle adaptés aux questions des jeunes pourraient déjà faire une différence.
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