Ce n’est pas d’hier que les enfants ont la vie dure. Violence familiale, infanticide, taxage, hyper-sexualisation, pédophilie et trafic d’être humains se disputent trop souvent la vedette des faits divers. Il existe pourtant des drames plus discrets, en apparence anodins, qui s’insinuent dans le quotidien de certains enfants qui, s’ils ne revêtent pas le caractère tragique des exemples précédents, n’en méritent pas moins toute notre attention.
Un jour, votre progéniture amènera peut-être un de ces gamins chez vous, si tel n’a pas déjà été le cas. Contrairement à d’autres qui, sitôt arrivés, courent jouer avec votre enfant en vous saluant distraitement, celui-ci s’arrêtera pour vous parler. Il vous manifestera un intérêt aussi sincère que spontané, à la mesure de celui qu’il souhaitera susciter en vous. Il vous donnera ce qu’il espère implicitement recevoir : de l’attention, de la considération, une reconnaissance de son vécu.
En parlant avec lui, vous ne tarderez pas à entrevoir le sentiment d’abandon qui se profile par moment derrière son sourire enjoué, comme si ses parents habitaient une dimension parallèle qui ne recoupe pas assez souvent la sienne. Il s’agit pourtant le plus souvent de braves gens, en couple ou séparés, aux prises, comme tout le monde, avec les contraintes de la vie adulte. Devraient-ils communiquer davantage ce qu’ils vivent avec leur enfant ? Sont-ils trop distraits par leurs soucis pour l’écouter adéquatement ?
Difficile de répondre à ces questions sans risquer un jugement de valeurs. Tant d’interprétations, toutes aussi plausibles les unes que les autres, peuvent se voir balayées à l’examen des faits. Et les faits, c’est trop souvent ce qui nous manque pour une juste vue d’ensemble du quotidien familial de l’enfant.
Si vous prenez le temps de l’écouter ne serait-ce que deux minutes, après sa dernière joute de game cube avec votre gamin ou avant le plus récent dvd en vogue, il trouvera pendant ce court instant un réconfort momentané. Votre foyer deviendra pour lui un havre où il connaîtra un peu de la vie familiale qui semble lui faire défaut.
Pour un seul de ces « nowhere kids » que nous croisons parfois, combien peut-il y en avoir, en mal d’attention parentale, en quête plus ou moins consciente d’une famille d’adoption ? Que faire pour adoucir leur quotidien ? À l’évidence, personne ne peut se substituer à un père, ni à une mère.
Que ce soit à l’adolescence ou à l’âge adulte, l’enfant demandera probablement des comptes à ses géniteurs. Peut-être pourra-t-il enfin s’en rapprocher ? Chose certaine, il devra lui-même apprendre à gérer ses rapports avec eux et les sentiments ou les émotions qui en découleront. Là non plus, impossible de se substituer à qui que ce soit.
Si vous connaissez un enfant de nulle part, n’hésitez pas à lui accorder de votre attention. Vous en retirerez peut-être encore plus de satisfaction que lui. À défaut de solutionner ses problèmes, vous l’aiderez, dans la mesure de vos possibilités et de vos disponibilités, à se sentir reconnu en tant que personne. C’est parfois suffisant pour en devenir une.
28 juin 2007
Ce Rétrolivier est paru dans Cyberpresse du 29 juin 2007, Le Soleil du 7 juillet 2007 et dans La Presse, rubrique À votre tour.
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