On m’a reproché récemment de faire preuve de cynisme envers la tragédie de Polytechnique dans mon texte intitulé Et la violence faite aux hommes, c’est cool ?… Beau prétexte pour dissiper toute ambiguïté.
Ai-je vraiment fait montre de cynisme à cette occasion ? Aucun doute là-dessus. Mais il est clair quant à moi que ce cynisme, que j’assume sans complexe, visait en fait la récupération plus feutrée que par le passé, mais tout aussi tenace, d'une tragédie québécoise. J'ai déjà reconnu l’an dernier, dans une chronique intitulée On cogne aussi les garçons, que le massacre de Polytechnique doit rester commémoré chaque année. Cet événement fait partie de notre histoire, au même titre que la crise du verglas. Tout par contre est dans la manière, sobre de préférence, mais c'est l’intention, surtout, qui compte…
Quand chaque commémoration annuelle se termine par le mantra « plus de soutien de l’État », comprendre « financier », entonné en coeur par d'influents regroupements de femmes, je reste perplexe devant pareilles tractations autour du souvenir des 14 jeunes femmes dont la vie a été tragiquement fauchée par un sociopathe. Voilà ce qui me rend cynique et mon attitude envers de tels procédés ne changera qu’avec leur disparition.
Je dois par ailleurs saluer la position de Polytechnique cette année, qui a remis à plus tard son symposium sur la paix, d'une part pour des raisons logistiques, mais d'autre part, à cause de réticences exprimées par plusieurs à se voir associés aux dénonciations annuelles de violence faite aux femmes. Chapeau à ces gens d'avoir le courage d'affronter l'ire probable des groupes féministes.
Ces femmes qu’on n’écoute pas
Dans un autre ordre d’idées, il est curieux de constater, malgré l’« hypersensibilisation » sur la violence faite aux femmes, que des corps policiers fassent parfois preuve d’une si grande insouciance quand certaines d’entre elles, menacées par un ex-conjoint, réclament leur aide. S’agit-il d’une réaction de saturation à un phénomène banalisé par les excès mêmes du dopage statistique et des stéréotypes de l’homme, prédateur, et de la femme, victime ? Il serait temps de se poser la question, quand la conscientisation présumée à la violence provoque la somnolence.
En 2008, onze meurtres de conjoints, soit neuf femmes et deux hommes, sont survenus au Québec. Pour tragique que soit cette réalité, une telle statistique n’a rien de spectaculaire si on la compare aux 300 000 femmes battues chroniquement au Québec, chiffre finalement réfuté par son auteure même. Ce nombre n’a pas non plus l’impact dramatique de la femme sur trois qui sera un jour victime d’une agression sexuelle, en réalité un résultat de sondage sans valeur, pas plus qu’il n’impressionne davantage que les 14 000 prétendus actes annuels de violence conjugale, en fait des signalements, dont 70 % entraînent la remise en liberté d’hommes dont on se demande pourquoi ils ont été d’abord arrêtés.
Trop peu pour compter…
Malgré les mythes véhiculés par le féminisme radical, on admet de plus en plus la bidirectionnalité de la violence conjugale. Le Québec reste un leader mondial en recherche dans la matière, notamment par le reconnaissance de la violence psychologique, domaine où la femme serait même en avance sur l’homme. Le fait que, désormais, les signalements d’hommes victimes de violence conjugale soient consignés, tant au plan provincial que national, permet un portrait mieux équilibré et plus représentatif de ce fléau.
Neuf femmes et deux hommes tués en un an, cependant : de petits chiffres, de faibles pourcentages. L’ennui, c’est que ces personnes sont mortes à cent pour cent. Ces données illustrent néanmoins que plus de femmes que d’hommes subissent de la violence physique extrême et décèdent des mains de leur conjoint. Aussi peut-on d'autant plus s’étonner de l’apathie de certains corps policiers devant les supplications répétées de femmes qui leur disent craindre pour leur vie et pour celle de leurs enfants. Comment oublier les cas survenus dans la région métropolitaine il y a quelques mois, de deux femmes qui, malgré leurs appels de détresse, ont péri, l’une même poignardée de cinquante coups de couteau devant ses enfants, eux-mêmes blessés par leur père en voulant la protéger ?
Un fléau pourtant en régression
Contrairement à certains propos alarmistes, le taux canadien d’homicide entre conjoints a fléchi d’environ la moitié entre 1978 et 2007, nous apprend l’Institut national de la santé publique du Québec. Il a reculé de 13 à 5,7 % pour les femmes et de 3,9 à 1,6 % pour les hommes. Il faudra se faire à l’idée que certaines formes de criminalité reculent. Tout ne peut pas aller en empirant.
Se pourrait-il que cette baisse même explique en partie la nonchalance, voire l’incrédulité, de certains corps policiers ? La balle est dans leur camp. Une prise de conscience sur la réalité tragique encore présente de ce type d'homicide pourrait aiguiser leur vigilance et épargner des femmes menacées. Voilà un cheminement dans lequel aucun groupe de femme ne peut concrètement intervenir.
Oui, tout de même. La sensibilisation à une meilleure écoute policière pourrait être mise de l’avant lors de la prochaine commémoration de Polytechnique. Voilà une intervention qui ne coûterait rien au payeur de taxe, permettrait de sauver des vies, et présenteraient nos leaders des groupes de femmes sous un jour plus valorisant que celui d’éternelles quémandeuses de subventions…
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