À notre époque où des hommes revendiquent les droits des pères à la garde partagée et ceux des garçons à une scolarité mieux adaptée, la résistance à ces changements souhaitables se révèle avec acuité. Un coup d’œil aux sites Internet voués à la condition féminine suffit pour constater à quel point ces problèmes sociaux sont banalisés, parfois même tournés en dérision. Il est intéressant de noter que, dans une société où les rapports homme-femme ont été définis par la gent féminine depuis une quarantaine d’années, des hommes expriment enfin des points de vue alternatifs, voire divergents.
Dans cette optique, la question apparemment anodine de savoir qui paye l’addition revient avec insistance. Le fait d’être un homme le prédestine-t-il à l’acquitter ? L’homme doit-il se laisser cantonner sans broncher au rôle de portefeuille ? La présence de la femme à sa table est-elle conditionnelle au fait qu’il la subventionne ? Voilà autant de questions qui s’imposent.
Après tout, les hommes s’entendent dire depuis quatre décennies de ne pas considérer les femmes comme des objets sexuels, non sans raison. On leur souligne à quel point cette attitude est réductrice et nie l’humanité même de la femme. Fort bien. Quand enjoint-on les femmes à cesser de considérer les hommes comme des payeurs tout azimut ? Quand leur précise-t-on que cette attitude est aussi réductrice et nie dans une égale mesure l’humanité même de l’homme ?
Il ne faudrait cependant pas sombrer dans l’intransigeance au point de refuser de régler l’addition d’une femme peu importe le contexte au nom de la condition masculine. Ce serait se priver inutilement de moments de bonheur tranquille. Qui n’a pas gâté sa copine en l’invitant au resto, pour le simple plaisir. Un homme peut aussi acquitter l’addition d’un autre homme par amitié. Pourquoi agir différemment avec une femme ? Le bât blesse toutefois quand l’homme se sent obligé de payer parce qu’il est un homme et que la femme s’attend à ce qu’il le fasse, pour cette même raison, quand elle ne l’exige pas.
Si plus d’hommes remettent en question de régler l’addition, un malaise survient quand la serveuse pose la question fatidique : « Une seule facture ? » Pourtant, les hommes devraient franchir l’étape du questionnement et agir selon leurs convictions. La femme pourrait mal le prendre ? Si un différend vous oppose sur un sujet aussi banal, une question importante vous séparera. Elle refusera de vous revoir ? Vous serez débarrassé d’une profiteuse en plus d’éviter une dépense inutile.
Il existera toujours des femmes qui considèrent les hommes comme des êtres humains à part entière. Pourquoi s’appauvrir en douteuse compagnie et gaspiller un temps précieux qui pourrait être employé judicieusement ? Il ne faut jamais oublier que les vautours sévissent dans la mesure où des pigeons leur permettent de les traiter comme tels.
7 septembre 2006
Ce Rétrolivier est paru dans La Presse du 17 septembre, dans Le Soleil du 19 septembre 2006, dans Le Nouvelliste du 25 septembre 2006, dans Cyberpresse du 25 septembre et dans Le Journal de Montréal, chronique de Louise Deschâtelets, du 11 novembre 2006.
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