mardi 24 août 2010

Please Please Me : On en fait des choses en une journée !

Plusieurs finaliseront leur ménage du printemps, d’autres concluront une affaire importante, certains enfin effectueront une excursion familiale en dehors de la ville.  Les Beatles, en à peine trois sessions totalisant 9 heures 45 minutes, ont quant à eux réalisé leur premier album, Please Please Me, le 11 février 1963, aux studios EMI d’Abbey Road.  George Martin, leur producteur, a voulu recréer sur disque le matériel que le groupe joue alors sur scène.  On est encore loin des cinq mois de gestation intensive de Sgt Pepper’s, en 1967.

Le premier disque nécessite 14 chansons, selon les standards de la maison Parlophone.  Quatre titres ont déjà été enregistrés, dont Love Me Do, classé 17e dans les charts britanniques, et Please Please Me, selon plusieurs, leur premier numéro un.  Si la première composition porte la marque de McCartney, la seconde est signée John Lennon.  Paul devait toutefois préciser, dans une entrevue post Beatles, que John envisageait sa chanson comme une complainte à la Roy Orbison.  Il en avait alors fredonné les premières mesures sur le ton langoureux du célèbre chanteur américain.  Le bassiste gaucher devait toutefois en accélérer le tempo, comme il le fera également plus tard avec Help ! et Revolution, deux autres classiques de son complice.

Les faces B respectives des deux premiers tubes des Beatles, soit PS I Love You, toujours de McCartney, et Ask Me Why, de Lennon, représentent les premières incursions sur disque des principaux compositeurs du groupe dans la ballade sentimentale bon teint.  Du bon boulot, agréable et efficace, à défaut d’être transcendant.

Please Please Me est le premier de trois albums constitués chacun de huit compositions originales et de six reprises, les deux autres étant With The Beatles et Beatles For Sale.  Le disque débute en chapeaux de roues avec l’électrisant I Saw Her Standing There, de McCartney, d’après une idée de Lennon.  Un jour, a déjà révélé Paul, John est entré en studio en fredonnant « Well, she was just seventeen, was not a beauty queen…»  J’ai trouvé le début intéressant, mais « was not a beauty queen » devait être changé, ajouta-t-il, non sans un sourire.

Dans sa dernière entrevue, Lennon affirmait de son côté que la chanson suivante, Misery, pourtant si lennonienne par sa thématique d’écorché vif, avait été écrite conjointement avec Paul.  Il entame ensuite la première des six reprises de l’album avec Anna (Go To Him), d’Arthur Alexander, l’une de ses idoles de jeunesse.  Lyrique et envoûtant.  Moins accrocheur, mais néanmoins sympathique, Chains, du prolifique tandem formé par Carole King et Gerry Goffin, offre à George Harisson une première occasion de faire valoir ses talents de soliste. 

C’est cependant sa prestation de Do You Want To Know A Secret, de John Lennon, qui deviendra l’un des premiers titres fétiches associés au Beatle tranquille, le leader initial du groupe se voyant mal interpréter cette chanson inspirée de son enfance et de Walt Disney.  Pour des motifs analogues, John confiera plus tard à George I’m Happy Just To Dance With You, sur l’album A Hard Day’s Night.  La chanson aura sans doute été jugée trop platonique pour l’image de rocker provoquant que Lennon veut alors projeter.  Les allures de bon garçon de George restent nettement plus compatibles.

Un autre bon garçon, Ringo Starr, fait également ses débuts de soliste avec Boys, un bon petit rock endiablé, rempli de Bop Bop She Wop entonnés par Lennon et McCartney, tandis qu’Harisson donne un avant-goût des solos de guitare qui deviendront son image de marque.

Paul manifeste son penchant pour la romance un tantinet sirupeuse avec A Taste Of Honey, de Scott et Marlowe (Il a toujours voulu enregistrer Besame Mucho, mais a dû rencontrer une nette opposition.) tandis que John donne la pleine mesure de son talent d’interprète avec la complainte frémissante et sensuelle Baby, It’s You, de Burt Bacharach. 

There’s A Place, sans doute l’une des meilleures compositions originales de l’album, annonce déjà le Lennon introspectif et articulé qui atteindra une première maturité avec l’album Rubber Soul, deux ans plus tard.

Ce dernier souffrant d’un bon rhume le jour de l’enregistrement, George Martin a sagement attendu la fin de la journée pour qu’il conclue l’album avec ce qui va devenir la reprise la plus célèbre du groupe : Twist and Shout, de Bert Russell.  Heureusement pour John, le titre est bouclé en une prise.


Si Please Please Me ne représente pas l’une réussites les plus achevées des Beatles, il révèle déjà ce dont ils sont capables loin de l’hystérie collective sans cesse croissante qui accompagne leurs prestations sur scène.  La spontanéité et la fraîcheur de leurs interprétations compensent ici très opportunément la complexité grandissante de leurs œuvres à venir.

Rétrolivier paru le 3 décembre 2008 dans Amazon.fr.

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